TROIS QUESTIONS A... Denis Baupin, fondateur d'Agir pour l'Environnement et adjoint à la Mairie de Paris

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Une récente étude d'AIRPARIF met en évidence la responsabilité des véhicules diesels dans le rejet de particules fines particulièrement nocives pour la santé. Le long des axes routiers, AIRPARIF a comptabilité 155 jours par an durant lesquels les seuils d'émission de particules étaient dépassés.

Le rejet de particules fines constitue-t-il un problème majeur de santé publique ?

Denis Baupin : Les particules fines, dont l'étude d'Airparif montre que 90% de celles émises par le trafic routier provient des moteurs diesel pose un problème majeur de santé publique. On compte, en France, 40.000 décès prématurés par an et une étude récente (APHEKOM) montre que les particules fines amputent en moyenne de 6 mois l'espérance de vie des parisiens. C'est considérable, et cela a d'ailleurs conduit la commission européenne à saisir la Cour de Justice européenne pour faire condamner l'inaction de la France qui détient le parc automobile le plus diésélisé au monde !

Cette étude n'est pourtant pas vraiment une surprise. Or, le Grenelle de l'environnement n'a pas vraiment touché aux incitations fiscales bénéficiant au diesel. Vous le regrettez ?

Denis Baupin : L'Etude d'Airparif, ne fait en effet que conforter ce que l'on sait et ce que nous dénonçons depuis longtemps. Pour autant le gouvernement n'a vraisemblablement toujours pas l'intention de revenir sur le dumping fiscal sur le gasoil, ni d'intégrer les émissions de particules dans le dispositif du bonus/malus. Il continue ainsi de favoriser la vente des véhicules les plus polluants d'un point de vue sanitaire. La cour de justice appréciera cette politique motivée par un soutien inconditionnel à l'industrie automobile française et en particulier à la marque au lion, promoteur historique de cette technologie polluante.

Que faut-il faire pour limiter l'exposition aux particules fines des habitants résidant le long de ces axes routiers fortement pollués ?

Denis Baupin : La loi grenelle 2 comporte tout de même une disposition intéressante - que le gouvernement a laissé introduire pour tenter d'éviter les sanctions européennes - c'est la possibilité pour les agglomérations françaises de mettre en place des « zones basses émissions » c'est-à-dire des zones où la circulation des véhicules les plus polluants est interdite. Une soixante de ces zones existent déjà en Europe avec à Berlin notamment des résultats très positifs (-58% d'émission de PM). Huit agglomérations, dont Paris bien évidemment, se sont portées candidates pour mettre en place de telles zones rebaptisées en France « Zones d'actions prioritaires pour l'air ».

Si les critères de sélections des véhicules sont suffisamment lisibles (et ciblent bien les véhicules les plus polluants : diesel et 4*4), si le périmètre de la zone couvre -comme a priori nous le souhaitons- une vaste zone incluse dans l'A86 et dépasse donc le périphérique, si le dispositif de contrôle est suffisamment efficace et disausif alors, comme à Berlin, on pourra constater une amélioration de la qualité de l'air dans l'agglomération parisienne et en particulier le longs des grands axes routiers, les plus exposés.

Mais cette mesure ne suffira pas à elle seule. Elle n'exonérera pas les collectivités locales et l'Etat de mener un politique visant à diminuer le trafic routier par le renforcement de l'offre en transport collectif et aux alternatives à la voiture et la réorganisation de l'acheminement des marchandises en ville.

Denis Baupin est également l'auteur de "Tout voiture, No futur" et de "La planète brule, où sont les politiques ?"