Interdiction du Bisphénol A - Trois questions à Yannick Vicaire, chargé de mission au RES

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Les sénateurs viennent d'adopter un projet de loi interdisant les conditionnements alimentaires à base de bisphénol A tout en portant le délais d'interdiction à 2015, contre 2014 initialement.

Question n°1 - Une loi visant à la suspension de la fabrication de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A, a été adopté en première lecture par le Sénat le 10 octobre dernier. Pourquoi était-il nécessaire d'interdire le BPA dans la fabrication des contenants alimentaires ?

Réponse de Yannick Vicaire - Le Bisphénol A (BPA) est un perturbateur endocrinien : à ce titre, il est actif à des doses infimes sur la régulation hormonale du corps et peut programmer chez le fœtus ou l'embryon le développement futur de multiples pathologies. Les travaux scientifiques indépendants associent l'exposition au BPA à plusieurs maladies chroniques en pleine expansion : cancers hormonaux, diabète sucré et obésité, hyperactivité, troubles de l'appareil de reproduction masculin, ... Le BPA est présent dans les récipients et ustensiles alimentaires en polycarbonate et dans les résines protectrices des conserves et canettes ; la voie alimentaire constitue la majeure partie de notre exposition. Interdire le BPA dans les biberons et l'alimentation des nourrissons ne suffit pas, il faut aussi protéger la mère pour protéger l'embryon, donc interdire tout usage alimentaire du BPA.

Question n°2- L'application de cette loi a cependant été repoussée à 2015 au lieu de 2014. Que penser de ce recul ?

Réponse de Yannick Vicaire - Le Sénat n'a été saisi de la loi qu'un an après son adoption à l'Assemblée Nationale. Ce retard est imputable au précédent gouvernement, qui aurait pu saisir le Sénat plus rapidement, puis au calendrier électoral de 2012. Les sénateurs ont souhaité conserver un délai de 2ans entre l'adoption de la loi et l'interdiction du BPA, par souci d'accorder aux industriels le temps de mettre au point des alternatives, soit 2015. Pourtant, plusieurs entreprises du secteur ont montré que le marché du sans BPA était déjà mûr : Nestlé, Heinz, Tupperware, Rubbermaid, ... Des labos INRA ont même développé 2 types de résines de remplacement pour les conserves. Mais les lobbys sont toujours friands d'années supplémentaires et ont réussi à convaincre les élus que les matériaux de remplacement devaient offrir toutes les garanties de sûreté. Un faux débat puisque parmi ces alternatives on compte notablement le verre, le tetrapack et plusieurs plastiques (PE, PP, polyesters) qui sont déjà des concurrents du polycarbonate. Par contre, pendant ces 18 mois de rab, 1245000 enfants seront exposés au BPA dans le ventre maternel.

Question n°3- Les industriels sont-ils aujourd'hui prêt à faire les efforts nécessaires et à trouver des alternatives non dangereuses pour la santé ?

Réponse de Yannick Vicaire - Chacun peut observer depuis plus d'un an l'apparition de nouveaux produits garantis sans BPA. Malgré leur discours hostile au changement, les industriels ont pris les devants et plusieurs marques sont déjà pionnières y compris pour les produits en conserve. Le RES a déjà sensibilisé les entreprises du bio qui sont confrontées aux mêmes défis. La loi prévoit la mise en place d'un étiquetage dans la période de transition d'ici l'entrée en vigueur de l'interdiction - il est certain que cette information orientera les consommateurs vers les marques proactives et les détournera des autres. Les assos joueront également leur rôle.

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