Nucléaire : l’État prépare un chèque en blanc à EDF… avec l’argent du contribuable
Alors que le gouvernement et EDF peinent encore à s’entendre sur le financement du programme EPR2 - six nouveaux réacteurs nucléaires prévus pour une mise en service à partir de 2038 - les premières annonces laissent déjà entrevoir une facture colossale. Facture que l’État s’apprête à faire payer aux contribuables, sans débat démocratique et au détriment des énergies renouvelables.
Un montage flou… mais déjà très coûteux pour l’État
Selon les éléments dévoilés par Bercy et l’Élysée, l’État accorderait un prêt à taux zéro à EDF pour lancer la construction, ce qui représente d’ores et déjà une forme de soutien massif. À cela s’ajouteraient des financements via la Caisse des dépôts, bonifiés par le Trésor public. En clair : l’État - donc l’argent public - paierait une bonne partie de la facture dès le départ.
Le reste serait financé par EDF via les marchés financiers, mais là encore, l’entreprise publique tente de limiter son exposition. Lors d’une audition au Sénat, le PDG d’EDF, Luc Rémont, a réclamé que la part financée par l’État passe de 55 % à un niveau proche des standards européens, c’est-à-dire 75 %, pour éviter à EDF de trop s’endetter.
Les leçons de Flamanville ignorées ?
Ce montage intervient alors même que le fiasco du chantier EPR de Flamanville devrait inciter à la plus grande prudence. Lancé en 2007 pour un coût initial de 3,4 milliards d’euros, il dépasse aujourd’hui plus de 20 milliards, avec plus de dix ans de retard.
Et qui paiera les dépassements cette fois ? Le gouvernement a déjà acté que les 15 premiers milliards d’euros de surcoûts seraient entièrement à la charge d’EDF, mais qu’au-delà… l’État interviendrait. Traduction : les contribuables couvriront les dérapages inévitables d’un programme déjà mal engagé.
Une stratégie à rebours des enjeux climatiques et démocratiques
Les six réacteurs EPR2 se placent dans la continuité de l'EPR de Flamanville.
- En juillet 2020, la Cour des comptes a estimé leur coût à 46 milliards d’euros.
- En septembre 2020, la direction du Trésor l’évalue à 47,1 milliards.
- En 2022, lors du débat public, EDF estime le coût de trois paires d’EPR à 51,7 milliards.
- Le 4 mars 2024, EDF annonce dans les Echos que les six EPR2 coûteront finalement 67,4 milliards d'euros !
En moins de 4 ans, le devis a déjà augmenté de 21,4 milliards d’euros et nous n’en sommes qu’à l’étape de la finalisation du design et non la construction elle-même.
Plutôt que de financer massivement les énergies renouvelables, créatrices d’emplois locaux et rapidement déployables, le gouvernement préfère signer un chèque en blanc à EDF, tout en faisant peser les risques sur les finances publiques, sans consultation ni transparence.